Dans une entrevue exclusive avec Telecom Review Afrique, Alain Biston, Président et Directeur Général d'Alcatel Submarine Networks nous présente les projets clés de l’entreprise pour 2022, l'importance des câbles sous-marins pour la transformation numérique, et d’autres points importants.
Pouvez-vous nous présenter brièvement ASN et faire part des projets clés pour 2022 ?
Alcatel Submarine Networks, qui fait partie de Nokia, est le leader mondial des fournisseurs de câbles optiques sous-marins avec plus de 650 000 km de systèmes optiques sous-marins déployés dans le monde. ASN fournit tous les éléments nécessaires à la construction d'un système de transmission sous-marin global complet, adapté aux exigences individuelles de nos clients, allant des applications traditionnelles de télécommunication aux infrastructures « over-the-top » et aux fournisseurs de services de contenu, ainsi qu'aux applications pétrolières et gazières offshore. ASN propose également un portefeuille complet de services, qui comprend la gestion de projet, l'installation et la mise en service, ainsi que les opérations maritimes et de maintenance effectuées par la flotte de navires câbliers dont ASN est propriétaire.
ASN est le seul acteur à pouvoir proposer une véritable offre end-to-end (de la fabrication jusqu’à la pose d’un système optique sous-marin) ainsi qu’une offre complète terrestre et sous-marine grâce aux produits Nokia. Nous avons une grande expérience dans la région avec de nombreux câbles faisant le tour de tout ou partie du continent africain (ACE, West Africa, WACS, Equiano, TE North, SMW5 Mer Rouge et Méditerranée, Metiss…).
Au cours des derniers mois, ASN s’est mis en ordre de marche pour absorber le pic d’activité attendu en 2022 et 2023 – cela concerne aussi bien la production que la pose. En plus de 2Africa, qui sera le plus gros projet jamais réalisé, ce ne sont pas moins de 12 projets (comme Africa1 et Bifrost) qui seront produits par ASN en 2022 et 2023. On pourra également citer EAUFON qui connectera des endroits reculés de l’Arctique et Natitua et qui reliera des iles de la Polynésie Française.
Quelle est l'importance des câbles sous-marins dans le contexte de la transformation numérique ?
Les systèmes de télécommunications sous-marins à fibre optique permettent aujourd’hui de relier n’importe quel endroit de la planète aux autoroutes de l’information déjà existantes. Nos câbles sous-marins permettent d’acheminer des dizaines de Tbit/s de capacité internationale vers les réseaux de nombre de pays africains. En plus de démocratiser l’accès haut-débit à Internet, la performance et la fiabilité de nos systèmes optiques sous-marins ouvrent la voie à toutes les nouvelles applications digitales tant pour les populations locales, que pour les entreprises avec le développement des offres de télécommunications fixes et mobiles, plus performantes et moins onéreuses. Cet accès à l’internet haut-débit est un véritable accélérateur dans la transformation numérique et la digitalisation, avec des impacts importants sur l’éducation, la recherche, la santé et l’économie des pays connectés.
Partout sur la planète, ASN contribue à connecter des populations qui n’ont aujourd’hui pas d’accès haut-débit abordable, comme par exemple avec Natitua (archipels polynésien) et EAUFON (Arctique) cités précédemment.
Pouvez-vous nous donner des nouvelles concernant le déploiement de 2Africa, l'un des plus grands projets sous-marins au monde ?
Le projet 2Africa avance très bien. Nous aurons bientôt finalisé la première phase du projet consistant à réaliser 30.000 km d’étude marine. Nous avons déjà produit la moitié de la partie appelée GERA (reliant la Méditerranée au nord et à l’est de l’Afrique et dont la pose débutera au 2eme trimestre 2022). Pour rappel, le réseau 2Africa, lorsqu’il sera complété vers mi-2024 totalisera plus de 45000 km de câble sous-marin, et sera à cette date le plus grand réseau sous-marin jamais construit.
Il reliera donc l'Afrique à l'Europe, au Moyen-Orient et à l’Inde avec 21 atterrissements dans 16 pays africains. Le câble sous-marin 2Africa fournira plus que la capacité totale combinée de tous les câbles sous-marins desservant l'Afrique aujourd'hui.
Cela contribuera non seulement à répondre à l'appétit explosif des Africains pour les données en améliorant la vitesse et la qualité, mais cela contribuera également à réduire le coût international de la livraison des données et ainsi à rendre les données plus abordables pour les utilisateurs africains. Cette amélioration massive de la bande passante internationale augmentera également les besoins en fibre optique intérieure africaine pour transporter ce trafic à l'intérieur de tout le continent.
Quelle est la meilleure approche que les fournisseurs de câbles sous-marins comme ASN peuvent adopter pour faire face aux calamités naturelles, aux perturbations ou aux sabotages ?
Tout d’abord, lors de la définition du projet, nous travaillons avec le client pour identifier la meilleure route marine et les meilleurs systèmes de protection adaptés au câble en tenant compte de l’environnement où sera déployé le système (armure, ensouillage, …).
En complément, pour contribuer à faire face aux changements climatiques, ASN fait évoluer son portefeuille de produits en ajoutant la possibilité d’intégrer différents capteurs sur ses câbles sous-marins. Les informations collectées par ces capteurs permettront de surveiller la température des eaux, le niveau des mers, les courants sous-marins, etc. En exploitant ces informations, il devient par exemple possible de détecter un tsunami en formation et de prévenir les populations concernées.
Depuis quelques années, avec sa solution OptoDAS (pour Distributed Acoustic Sensing) ASN développe également des produits dédiés à la surveillance des câbles et infrastructures sous-marines, la détection de tremblements de terre, la surveillance des conditions océanographiques…
D’autres niveaux de protection supplémentaires peuvent être envisagés, et sont du ressort de l’opérateur ou des états.